• Cyberpunk Reload, épisode on-ne-les-compte-même-plus

    Allez, cyber-cochon qui s'en dédit : c'est reparti (brièvement, faut pas déconner non plus) pour le Cyberpunk Reload ! Pour les distraits (nan, je déconne, ça va pour cette fois, je vous fais un mot), rappelons qu'il s'agit d'un long et minutieux passage en revue de toute la gamme du mythique jdr Cyberpunk 2020 pour en examiner les qualités et les défauts grâce à un salvateur recul post-geek. J'en ai fait une compile avec des liens actualisés ici : http://mondesenchantier.eklablog.com/cyberpunk-encore-reloaded-a130468698

    Alors, on peut légitimement se demander ce qui m'arrive après tant de temps d'interruption de ce petit recensement maison. Des remords : j'avais jusqu'ici écarté les suppléments non-canoniques publiés par des éditeurs tiers parce que j'avais déjà fort à faire devant l'imposante collection de trucs et de machins estampillés Oriflam et R. Talsorian Games. Le seul truc ballot, c'est que c'est dans cette partie congrue que l'on trouve, AMHA certes mais indiscutablement (pour moi, donc), les deux meilleurs suppléments Cyberpunk. Ever.

    J'ai nommé... roulement de boîte à rythme 80's... les suppléments Ianus Games Dark Metropolis et Grimm's Cybertales. Ouaip, mon pote.

    Aaah, ça, je vous l'accorde, ils ne partaient pas vainqueurs ces deux là. Un éditeur alors obscur (moins après qu'ils se soient rebaptisés Dream Pod 9 : Heavy Gear, Tribe 8, etc.) , 100 % en anglais (canadien, en plus ! - ce qui permet d'avoir dans les crédits des contributeurs aux noms bien cyberpunk comme Jean Carrières, Pierre Ouelette ou Dominique Durocher ^^), plein de petites règles annexes, des noms chelous (oh bah dis donc, "Dark" sur une couverture de JdR...), des couvertures violacées toute moches et pas dans le ton (en même temps, on était habitué avec la gamme officielle donc bon...)... c'est incroyable que j'aie acheté cela, moi, à l'époque. J'étais quand même un sacré drog... euh, un gros consommateur, quoi.

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    Surtout, bien pire, ces suppléments portaient un terrible fardeau : ils appartenaient à la même collection que Les enfants de la nuit (Night's Edge), alors précipitamment traduit et diffusé par Oriflam (qui, bizarrement, avait par contre passer son tour sur leurs excellents suiveurs... enfin, bref...). Or, l'idée de base de ce supplément-là, c'était d'importer les vampires et autres loups-garous copiés/collés du fameux Monde des Ténèbres à Night City. A l'époque, je passais ma crise d'adolescence sur les jeux à base de vampires et de loups-garous. Je ne l'ai pas acheté, pas lu, pas même feuilleté sans doute. A l'époque, ma règle d'or, c'est : vampires = caca.

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    Heureusement, le rapport entre Les enfants de la nuit et nos deux chers suppléments est assez ténu (je veux dire : à part l'auteur, Justin Schmid, qui a écrit seul, intégralement, les trois suppléments 8-0). L'idée commune est d'introduire un genre plus mature, plus horrifique aussi, dans des parties de Cyberpunk 2020 qui peuvent parfois être jouées à l'époque, il est vrai, de manière assez puérile ("j'ai un gros flingue et un gros cyber-bras... gnaaaa... con-tent").

    Or, là où Les enfants de la nuit s'intéresse au fantastique clinquant façon Monde des Ténèbres, Dark Metropolis et Grimm's Cybertales se proposent eux de réintroduire dans Night City une horreur urbaine franchement réaliste. Du coup, les 4eme de couverture s'ornent d'un "recommended for mature readers" qui ne se mouche pas du coude (c'est pas Sade non plus, hein) mais qui résume quand même bien l'idée de ces deux supp' : et si on jouait de façon un peu plus réaliste et un peu plus sombre dans Night City, hein ? Et là, je dis : banco !

    Commençons par celui des deux supp' qui incarne le mieux l'idée : Dark Metropolis. Je cite l'argumentaire du 4ème de couvrante  : "make city life more interesting". C'est exactement ça. Vous trouvez que Night City ressemble un peu à un Disneyland propret et clinquant pour solos bodybuildés ? Venez picorer ce qu'il vous faut dans D. M. et votre Night City prendra un petit goût de rouille et de crasse qui est justement ce qui manque à 99 % de la gamme officielle.

    Passée la couverture moche et pas du tout inspirante, on est plutôt agréablement surpris par la présentation intérieure. Pourtant, au premier coup d’œil, les p'tits miquets aux yeux globuleux de Ghislain Barbe peuvent sembler décalés à la fois vis à vis de l'imagerie traditionnelle du genre et même encore plus par rapport à l'objectif sombre et réaliste du bouquin. Pourtant, ça le fait. D'une part, c'est agréable d'avoir une unité de style à travers ce seul illustrateur qui, au moins, à une patte, une vraie touche personnelle. De plus, il y a vraiment beaucoup d'illustrations (quasiment une par page). Enfin, sa touche un peu manga fait justement mieux passer le contenu parfois un peu glauque du bouquin. Non, franchement, j'suis fan.

    La mise en page est assez classique mais très propre : c'est aéré, les encadrés nombreux et lisibles, les sections sont bien distinctes... ce qui est essentiel compte tenu du parti-pris du bouquin. En effet, D. M. est un supplément bien différent de ceux de la gamme officielle qui, le plus souvent, tirent péniblement à la ligne ("tiens, et si on rajoutait des flingues ?"). Là, c'est dense mais tout est optionnel. Il s'agit d'une série de sujets traités sur quelques pages chacun et auxquels ont peut librement choisir d'adhérer ou bien auxquels on opposera un désintérêt poli.

    Voyons un peu.

    La première section ne démarre pas très fort. Il s'agit de tables de création de PJ proposées en remplacement de celles du fameux système de création de PJ de CP2020. Mouaif, moi, j'ai mes PJ depuis belle lurette alors... Cela dit, leur lecture avive les regrets : elles sont beaucoup plus intéressantes que celles qui se contentent de déterminer le nombre de frères et sœurs du PJ. Elles s'intéressent en particulier à la psychologie du PJ : désordres, dépendances, petits travers... 

    La suite est un court système de gestion du stress qui, idéalement, aurait dû être au cœur du système de jeu de CP2020, non ? Cela ne fait que 4 pages, c'est assez simple à gérer (on gagne et perd des points, on risque de "passer la limite", etc.), bien vu (on prend même du stress simplement en fonction de l'environnement anxiogène) mais il faut admettre que les adopter ajoute une couche de règles supplémentaires à gérer en plus des compétences sur puces, de l'Humanité, des prothèses cyber, des montées en Matrice, etc.

    Même remarque pour le point suivant : des règles de dysfonctionnement de la technologie, y compris de la cyber. J'adore l'idée ! Qualité des équipements, maintenance puis finalement bug au plus mauvais moment (genre : sur tes cyber-yeux, connard ^^). Un vrai plus qui peut, à mon avis, bien mieux que la gestion de l'Humanité, freiner la surenchère à l'équipement techno.

    La section suivante est un coup de poignard dans le dos du supplément Night City : ah bah oui, tiens, c'est vrai qu'on n'y parle pas de la... vidéosurveillance ! Quelques règles très simples pour déterminer si une scène a été filmée ou non, pour manipuler des images, etc. Un must.

    La section suivante, plus velue, semble au départ assez WTF comme disent les jeunes. On y évoque en long, en large et en travers les... radios libres alternatives 8-0 Ouais, c'est un peu bizarre mais bon, on était en 1994. On regrettera donc le côté un peu vintage à l'heure du web 2.0 mais l'idée reste excellente pour donner un sens aux PJ Medias. C'est de plus très complet avec des règles pour créer son propre média indé, pirater les ondes des médias mainstream, etc. Le coup de grâce donné au (très) médiocre supplément officiel Live & Direct.

    La section suivante est anecdotique avec ses deux petites pages mais reflète bien le concentré de putain de bonnes idées de ce supplément : on y évoque les rassemblements festifs urbains (genre fête du Beaujolais, 'voyez ?) et les débordements qui peuvent y être liés.

    La suite est un des best de ce supplément : les catastrophes, naturelles ou d'origine humaines. Comment elles peuvent impacter la ville, le rôle des autorités, des forces de l'ordre... de quoi rajouter une belle dynamique à un scénario lambda avec une petit tremblement de terre des familles, non ? Le chapitre est prolongé par un focus qui montre le génie du créateur de ce magnifique supplément : le réchauffement climatique. Ouais, mon lapin : en 1994. Impossible de dormir correctement les nuits de canicule, impossible de porter une armure en plein cagnard, dysfonctionnements en série de matos trop fragile, plus de réseau électrique, etc. : de quoi singulièrement compliquer la tâche de PJ trop sûrs d'eux.

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    On a ensuite une grosse section sur les émeutes urbaines (qui aurait mérité d'être raccrochée au thème des rassemblements festifs mais bon...). Désordres liés à une émeute (pillages, règlements de compte, etc.), type d’intervention des forces de l'ordre, monter sa propre émeute (un must pour les Rockerboys). Le gars arrive quand même à te faire 9 pages sur le sujet sans bla-bla : chapeau.

    Je passe vite sur les deux types de perso proposés ensuite (en gros, l'espion et le recouvreur de dettes) : c'est la partie la plus faible du bouquin.

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    La suite est excellente : elle présente le principe des "asylums", en gros des planques. A quoi elles servent, comment s'en procurer une mais, surtout, toutes les règles pour que les PJ définissent et gèrent leur planque commune. Comme le média indépendant vu plus haut, cela peut apporter une vraie dynamique aux groupes souvent trop disparates de CP 2020. La notion jumelle d'"enclaves", elle, adapte l'idée aux groupes de PNJ : sectes, gangs, etc.

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    La suite était attendue dans un supplément de ce type : les drogues. Une bonne douzaine de pages avec généralités, exemples de drogues, et règles complètes pour créer ses drogues et gérer les "états altérés" de vos PJ. C'est vraiment meilleur que celles du jeu de base. Après, une fois de plus, cela fait encore des règles à intégrer. Shadowrun ? Ouaip, ça pourrait finir par y ressembler en continuant comme ça...

    Derrière, le gars en remet une couche avec une évocation en 4 pages bien tassées des Near Death Experience (comment en avoir en - relative - sécurité ? qu'est-ce qu'on en retire ? etc.). Balèze.

    La suite est le deuxième moment WTF du supplément : le Emotive Rock. Alors, rassurez-vous, il ne s'agit pas de K-Pop jouée par des garçons sensibles aux coiffures improbables. Non, le sujet est une musique expérimentale qui pourrait agir concrètement et fortement sur les émotions de ceux qui l'écoutent. Bon... comment dire... pourquoi pas ? Pas indispensable mais cela ne prend que deux pages et demi et reste rudement inspirant pour une campagne avec ou autour des Rockerboys.

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    Aaaaah, vient enfin le chapitre sur le sexe ! C'est court, pas graveleux pour deux sous... et ça tape encore juste là où il faut : prostitution dans la zone de combat, prothèses érotiques (eh oui...), plaisirs virtuels, etc.

    La section suivante n'aura de rapport avec ce qui précède que dans le cerveau malade des plus pervers d'entre vous : les animaux domestiques. Oui mais génétiquement modifiés, s'il vous plaît. Bon, bof, ça vient un peu là comme un cheveu sur la soupe mais, le pire, c'est que, sans être bien original, c'est mieux fait que ce qu'on trouve sur le même sujet dans un des Chrome (3 ?) de la gamme officielle. Triste.

    Le supplément finit sur un truc de gue-din : un scénario scripté de 25 pages. Si. Et sans armure de combat intégrale ni chars d'assaut. Si. Je ne l'ai pas joué rapport à mon niveau d'anglais trop médiocre (lire au calme OK mais retrouver une info au débotté en pleine partie... euh :-/ ) mais c'est pas mal du tout avec un méchant pervers, des émeutes urbaines, des violations de vie privée, etc.

    En résumé, Dark Metropolis est avant tout un sourcebook dans le sens noble du terme. Si vouloir tout utiliser (notamment les règles additionnelles) risque d'être indigeste, le feuilleter avant une séance ou, mieux, avant l'écriture d'un scénario, c'est l'assurance d'être dans le ton et d'avoir plein de bonnes idées pour tous ces petits détails qui donnent vie à une vraie métropole des sombres années 2020.

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