• Ecran total* (1ère partie)

    Je me demande quand même si M. Mondes en Chantier ne se serait pas emballé un petit peu vite en déclarant il y a quelques temps sur ce blog les dessinateurs et illustrateurs français champions du monde de l’écran de JdR…

    Viva España ! (air connu)
    Ce serait par exemple méconnaître le travail réalisé pour l’écran du Capitan Alatriste Le personnage d’Arturo Reverte est en train de connaître sa sucess story puisqu’en plus des romans dont le plus récent date de on peut aussi découvrir ses aventures en BD et prochainement au cinéma, et même, consécration suprême, en JdR dans la langue de Luis Fernandes. On l’a vu, les espagnols peuvent aussi gagner, ce qui m’amène tout logiquement, sous ce grand titre de saison, à approfondir un peu la question sur Mondes en Chantier, le blog préféré des rôlistes cérébraux.


    Abstrait ou figuratif ?
    On voit bien (sic) que ce n’est pas anodin un écran, c’est symbolique. Par exemple le jour lointain où l’un des frères Ledoux (l’Histoire a oublié lequel) a aspergé de gouttelettes de peinture rouge l’écran d’Empire et Dynasties de François dans les locaux du Club Damoclès après que le projectile de son tir de paint-ball (prodigué par le trou d’une serrure) eut percuté de façon inattendue la tête d’un clou qui dépassait d’un mur sur son passage, échouant ainsi à percuter une autre tête pour lui river son clou, c’était une attaque au symbolique qu’à l’époque, cachés sous la table ou dans les angles morts, nous ne perçûmes que confusément.
    C’est ce rôle de re-présentation, de médiation entre la fiction qui s’énonce et les auditeurs-joueurs que nous rappellent les écrans que beaucoup d’organisateurs de conventions ont désormais l’agréable coutume de disposer sur les murs pour les porter à la dégustation de tous, comme autant de petites madeleines.

    La société écranique
    L’écran de Jeu de rôle c’est en lui-même un paradoxe, une transparence opaque, l’incarnation de l’image comme intercession. Le visuel choisi pour cet accessoire du MJ se révèle être un outil de communication entre l’univers imaginé par les créateurs du jeu (par l’intermédiaire du meneur de jeu) et les joueurs. Dans cette perspective l’écran est donc à considérer comme une production de l’imaginaire visant à établir un rapport avec le monde créé.
    L’écran de jeu a ainsi une fonction épistémique évidente, c’est un outil de connaissance, parce qu’il donne aux joueurs des informations sur le niveau technologique, les différents lieux visitables ou les divers PNJs dont on pourra croiser la route sous forme visuelle, que ce soit avec une illustration, des cartes ou des tableaux de données.
    C’est un support complémentaire des mots du MJ, son image et ces mots se nourrissent les uns les autres : l’image (et les autres images que sont les illustrations de la gamme) engendre des mots qui engendrent des images dans la tête des joueurs.

    L’œuf ou la poule ?
    C’est aussi un accessoire indispensable du jeu pour les européens. Et s’en était un pour notre père à tous : pour que les dés puissent ne servir qu’à faire du bruit derrière un écran, il faut qu’il y ait un écran !
    Voici une liste non exhaustive de ce qui se fait en la matière.

    Les écrans photomontages
    Pour Cendres on pourrait plutôt parler de mixte entre photomontage et dessin, un truc marrant au passage : le balcon derrière sa tête fait comme des oreilles d’elfe à la fille, et l’effet circulaire un peu raté sur le nuage lui rajoute une auréole de sainte. Cendres, Unknown Armies, Vermine (si ce n’est pas un dessinmontage, à vérifier), marrant ça, est-ce que ce serait une marque de fabrique des jeux à l’ambiance glauque ?

    Les écrans avec une photo tirée du film
    Je pense à une image extraite du Seigneur des anneaux, ou un montage de photos du film Star Wars, bref c’est un grand classique des jeux tirés du Film, alors que les jeux tirés du Roman préfèrent les illustrations. A ce sujet comparez justement l’écran de JRTM et celui du Seigneur des Anneaux.

    Les écrans avec une illustration panoptique dits du « bouclier d’Achille »
    7ème mer, un peu Archipels D20, Ars Magica, Chimères, DD3, beaucoup d’écrans s’essayent à saisir en une image figée tous les éléments clefs d’un jeu. Comme je le disais précédemment ceux-là jouent à fond sur la fonction épistémique de ce support.

    Les écrans avec une grande illustration souvent d’un illustrateur connu

    Athanor (Fred Blanchard), Berlin XVIII (Gassner), Bitume (Vatine), Bloodlust (Alberto Varanda), Capitan Alatriste, Exil, Te Deum (Saint Barthélemy - étant entendu que sur ce coup là l’adjectif grande est à prendre au sens figuré et plutôt comme un compliment que comme un constat de format), de nombreux écrans ont eu les honneurs d’un dessinateur ou illustrateur célèbre, parfois avant qu’il ne soit vraiment connu d’ailleurs.
    L’écran avec la photo de l’auteur
    Red Dwarf est à ma connaissance le seul jeu dont l’écran présente la pomme de son auteur, et je voulais quand même le noter. Mais est-ce bien l’auteur du jeu ? Je lance ici une grande enquête d’utilité publique, certain que les fiers lecteurs de Mondes en Chantier, armés de toute leur sagacité, auront à cœur de faire la lumière sur cette mystérieuse affaire.

    L’écran avec une belle illustration centrale et des trucs plus ou moins moches sur les côtés
    Malheureusement la liste est longue : Aquelarre, Ars Magica, Cadwallon, Dark Earth, Retrofutur … Pour Guildes c’est le contraire : les trucs moches sont au centre et permettent de constituer un triptyque avec de chaque côté une illustration déjà publiée dans le jeu de base. Je ne sais pas vous, mais moi à chaque fois ça me désole, je trouve que ça détruit l’effet de sidération produit par une belle image telle qu’en elle-même. Parfois l’idée (souvent américaine) est d’utiliser tout ou partie de la surface extérieure - celle que voient les joueurs, pour leur proposer justement les tableaux et points de règles qui les concernent.

    Et à la fin une grosse baston

    Honneur aux anciens : la Table ronde, puis Eleckase, les deux écrans L5R, Runequest, là aussi la liste est longue, et souvent ces scènes de batailles viennent rappeler ou souligner le côté épique voir mythique de l’univers du jeu.

    Les écrans « Vache qui rit » et les écrans avec mise en abime
    Je ne connais pas d’écran « Vache qui rit », c’est-à-dire utilisant le principe de l’image dans laquelle on peut voir la même image en plus petit dans laquelle on peut voir la même image en plus petit dans laquelle… en cascade, mais j’en parle quand même par ce que ça me semble un procédé qui serait intéressant à utiliser sur ce support. Bon, c’est une idée comme ça.
    Des écrans utilisant le principe de la mise en abime en revanche il y en a beaucoup : 7ème Mer (double mise en abime, venant d’un jeu de pirates c’est assez normal même si on l’attendait plutôt de Polaris, pouf pouf …), Call of Cthulhu, Maléfices Catéschisme… c’est assez pratique en effet de recourir à la mise en abime pour renforcer l’immersion (pouf pouf pouf) dans l’univers d’un jeu. Parfois c’est bien venu, parfois c’est au contraire mal accueilli : pour Catéschisme (par ailleurs une superbe illustration même si on a pu lire ici ou là que d’aucun regrettaient l’abandon des anciennes couleurs pour le passage à une gamme de tons plus chauds) de nombreuses personnes ont fait remarquer que ce choix de présentation soulignait ou indiquait trop ostensiblement le rôle de marionnettiste illusionniste du MJ dirigiste adepte de scénarios linéaires tel que l’imaginaire rôlistique commun se le représente. Mise en abime pour tempête dans un verre d’eau, on voit que les réflexions autour d’un écran vont parfois chercher loin et que, dans une image, tout fait signe.
    (à suivre...)
    « Ô Ravage, ô désespoir !Ecran total (2ème partie) »

  • Commentaires

    1
    Lundi 8 Septembre 2008 à 19:57
    Cela ne sera pas une surprise si j'écris que l'écran de Capitan Alatriste a toutes mes faveurs. Il plonge directement les joueurs dans l'ambiance.
    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :