• Hellywood, compte rendu de lecture

    Bon, bon, bon, comme [ALT+R]Fred, notre plus fidèle (seul ?) lecteur, l'a exigé le voici fissa : j'ai tout bien lu mon exemplaire de Hellywood, le dernier jeu de rôles de chez JohnDoe. Alors hop, compte rendu de lecture.

    Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, Hellywood est un jeu de Emmanuel Gharbi (Monsieur Exil) proposant d'explorer l'univers des années 1940 revisitées par les romans et films noirs (genre Le faucon maltais ou Le grand sommeil) avec une pointe de fantastique parce que quand même on est des putains de rôlistes faut pas déconner quand même merde. On va y revenir. Notons que les hôtes de céans font sans doute partie des rares spécimens de joueurs francophones à s'être essayés à Noir RPG un jeu américain de ce type sorti il y a... oula, y a trop longtemps déjà. C'est dire si on est des sévères quand même. Pour mémoire, il y a même une rubrique "Noir bitume" sur ce blog que David, des fois, remplit d'un petit bidule. Allez, j'y ajoute ce CR.

    La découverte du livre débute par une légère déception : la couverture. Très inspirée du comics Sin City, elle ne me paraît pas du meilleur effet avec un logo un peu bateau et un dessin noir et blanc finalement pas très réussi. JD a déjà fait mieux. L'intérieur, évidemment tout noir et blanc, est sobre mais satisfaisant. Les dessins y sont globalement bien réussis, la mise en page agréable et lisible, la feuille de perso élégante. Ce n'est pas RDD2 ou Capharnaum mais ce n'est pas non plus ce quon attend des petits formats JohnDoe. Justement, à propos : Hellywood est littéralement truffé de portraits de PNJ (une centaine, je crois !!) de la plume de Le Grümph. Bien dans le style de ce dernier, ils sont très agréables, très stylés. Hélas, l'abondance de texte, le format A5 et le nombre de pages limité (225 quand même)... font que chacun de ces dessins n'est au final pas plus grand qu'un timbre poste. Que d'efforts pour preque rien ! Espérons que JD les réutilise dans un prochain supplément ou qu'ils soient proposés dans un PDF (pourquoi pas des cartes à imprimer avec portrait et nom au recto pour les joueurs et secrets pour le MJ au verso : ce serait classe et très utile en partie !) afin de leur rendre justice.

    Hellywood, un peu à la manière du livre de base de Crimes, prend l'allure d'un récit subjectif mené par un narrateur. On sait que cela ne donne pas les meilleurs résultats pour retrouver les infos (moins en tout cas qu'un chapitrage "2.1.3 Matos à viander", par exemple) mais ici cela s'impose tant le genre exploré est littéraire. Ce narrateur nous présente d'abord son histoire personnelle ce qui est, en quelques paragraphes bien sentis, l'occasion de nous brosser à grands traits à la fois le genre Noir et les spécificités d'Hellywood, notamment la présence d'être surnaturels. Le gars enchaîne avec un premier survol de la ville d'Heaven Harbor. Cette dernière est une ville semi-imaginaire. En effet, sur Google Earth, si vous entrez ce nom, vous ne trouverez rien. Par contre, si vous entrez Los Angeles, San Francisco et quelques autres villes de la côte ouest et que vous en faîtes une synthèse, vous avez Heaven Harbor. C'éatit aussi ce biais qui était utilisé dans Noir RPG et cela semble très bien convenir au genre où tout se passe dans LA vile plutôt que dans UNE ville. A noter d'un point de vue pratique que le survol en 10 pages de la ville sera plus qu'utile pour se retrouver dans la présentation détaillée de celle-ci plus loin.

    Les 12 pages suivantes sont consacrées à l'épineuse question de l'intégration du fantastique dans le genre Noir. Alors ? David va-t-il fuir en huralnt à l'hérétique ? Seul lui pourra vous le dire mais moi : j'aime plutôt. Plutôt car je ne suis pas totalement convaincu par l'utilité impérieuse de l'introduction d'une dose de fantastique dans tout ce qui concerne les D20 et les pizzas froides mais, ici, c'est franchement fait avec goût et intelligence (Monsieur Exil je vous dis...). C'est du fantastique "affleurant" comme on dit parfois. Les démons ne lancent pas des fireball dans la rue, il n'y a pas des hordes de zombies dans les venelles, pas de vampires ou de momies non plus. Encore moins d'elfes ou de nains. Ont été exploités seulement et uniquement les thèmes fantastiques qui recoupent les thèmes du genre Noir. Par exemple, celui du pacte démoniaque, de la corruption ou encore la figure des succubes plus ou moins assimilées aux Femmes Fatales. Au fianl, celui qui veut squizzer le fantastique ne perd pas le bénéfice du bouquin : il lui reste 100 % du système de jeu et 90 % du background (quelques substitutions et hop).

    Le chapitre suivant est un fameux morceau. On revient vers Heaven Harbor mais cette fois-ci, suivez le guide  : c'est parti pour 90 pages de description de la ville et, surtout, de ses habitants puisque la description s'émaille de la présentation d'une centaine de PNJs importants. C'est un cas rare, peut-être unique pour un livre de base d'un jeu de rôles de proposer une aussi copieuse description de la ville phare où se déroulent l'essentiel des aventures. En peu comme si le supplément Night City avait été inclus dans Cyberpunk 2020, quoi. C'est très, très appréciable et bien dans la politique éditoriale de JohnDoe qui propose un maximum de "pêt à jouer". Un bémol, toutefois, il est quand même très difficile de s'y retrouver dans le texte massif et peu aéré. Un rappel : mémorisez d'abord très bien le "digest" de 10 pages sur la ville avant de vous lancer dans le reste. Une autre astuce : imprimer le tableau synthétique des PNJs dispo en PDF sur le site du jeu :
    Whispers.

    Eh, e tlancent pas des dés dans Hellywood alors ? Si, si, ça vient. Avec le chapitre suivant, on en arrive au système de jeu. Il s'agit d'un système original dont le moteur se veut inspiré du craps, un jeu de dés de voyous américains. Les jets se font avec 2D6 ; 7 ou 11, gagné, 2,3 ou 12, perdu, autre résultat, p'têt ben qu'oui, ptêt ben qu'non (varie en fait en fonction des circonstances et/ou des talents du personnage). Pourquoi ? J'en sais rien, il paraît que c'est le craps, ça. J'ai en fait un peur que ce soit une fausse bonne idée à la fa çon du 4 de Kuro qui ne compte pas car il porte trop malheur. En fait, on s'en fout. Aucun joueur français ne connaît suffisamment la culture japonaise pour savoir un truc pareil. Aucun joueur français ne connaît les règles (l'existence ?) du craps. Pour l'ambiance, on repassera. Il reste un moteur de résolution pour le moins peu intuitif.

    C'est un peu dommage (même si ça n'est pas très grave non plus) car le reste du sytème de jeu est vraiment excellent à mon goût. Dans un style que je dirais semi-narratif (qui prend systématiquement en compte les spécificités de l'univers mais pas prise de tête imbitable pour autant), il propose un excellent codage du genre Noir. En bref et de façon non exhaustive, on peut noter :
    - le principe des Natures autour desquelles se construit un personnage (trait de caractère ou d'identité comme femme fatale, alcoolo, loser, révolté...) ; il y en a pas moins de 35 de proposer ! A raison d'une combinaison de 2 pour chaque perso, cela laisse un très large choix possible.
    - le choix des caractéristiques qui, au nombre de 9 et très typées (Trogne, Punch, Mojo...), sont très nettement privilégiées par rapport à une maigre liste de talents (= compétences)
    - les Fuckin' Bastard Points, sorte de points d'antihéroïsme qui pemettent de recevoir momentanément un coup de pouce du destin avant que celui-ci ne vous revienne en pleine gueule et avec les intérêts s'il vous plaît (le tout à la discrétion de votre MJ sadique...)
    - la roulette russe, astucieusement représentée sur la fiche de perso et qui permet de tenter le tout pour le tout (= obtenir un gros sauvetage ou un gros avantage inattendu dans une situation critique) en cochant un des 6 logements de balle du barillet ... à condition que le D6 ne désigne pas une des balles déjà cochées sinon...
    - les "caves" qui sont les réserves de jetons du craps et qui permettent donc de miser des points pour augmenter ses chances...

    Bref, plein de très bonnes idées qui aident à se plonger dans l'ambiance Noir tout en faisant son office, c'est-à-dire en offrant une résolution pratique des actions tentées par les joueurs. Du coup, on déplore un peu le manque de place consacrée au système. Moins de 40 pages pour tyout ça, c'est un peu juste. Quand un système de jeu est bon et, surtout, au service de l'univers, il ne doit pas, me semble-t-il, rester dans son coin comme s'il était puni ou indésirable. Quelques pages de plus prélevées dans d'autres copieux chapitres auraient pu permettre de développer ou de mieux expliquer certains points.

    On a dans la continuité un petit chapitre croupion qui présente en 8 pages une agence de détectives dont la vocation est d'être l'auberge à scénars de Hellywood. Pour un jeu Noir, je ne suis pas forcément fan de l'idée mais, en même temps, l'absence d'un tel outil aurait été reprochée à l'auteur à coup sûr, alors...

    Il reste du lourd, du sévère, du costaud dans ce petit livre bourré jusqu'à la gueule : les inspis et conseils. Habituellement, il s'agit d'un peit chapitre voire d'une page ou deux vite expédiées mais là, il s'agit d'un de sprincipaux chapitres du livre. Tout d'abord, les inspirations sotn ici assumées comme dans aucun autre jdr de ma connaissance (sauf quand, bien sûr, le jeu est explicitement l'adaptation d'UNE oeuvre précise). L'auteur dévoile toutes ses inspirations en détail et les commente. Cela nous fait une très utile synthèse du genre. Viennent ensuite de très copieux conseils sur la façon de rendre le genre Noir aussi bien dans le cours de la partie que dans la conception de scénarios. Très bien et en... 20 pages (quand même !).

    Justement, le livre finit par deux scénarios qui, à première vue, me paraissent un peu courts par rapport à la profusion des infos des autres chapitres. Ce n'est pas dramatique dans le sens où... tatatam... Hellywood va avoir le bon goût d'être le premier jeu JD à être doté d'une gamme de suppléments. Gamme réduite puisqu'elle devrait être constituée d'un écran (sans doute avec livret ?) puis, donc, d'une campagne. A suivre très attentivement, donc.

    En attendant, au bilan, on notera encore l'incroyable rapport qualité-prix de l'ensemble : un jeu complet avec système original, description de ville et deux scénarios pour environ 30 euros, qui dit mieux ?
    Hellywood est sans conteste mon coup de coeur de ces derniers mois et j'ai bien envie de me mettre à gribouiller deux/trois conneries pour ce jeu, à commencer, pourquoi pas ?, par un scénario classique (sans fantastique).
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  • Commentaires

    1
    Jeudi 19 Juin 2008 à 20:49
    Cela faisait un petit moment que ce jeu me faisait de l'oeil, même si sa couverture m'avait plutôt refroidi.
    La lecture de tes textes est en train de me faire basculer clairement vers son achat.

    J'enfile mon trench, je glisse mon soufflant dans ma poche, et en avant pour le Noir. ;-)
    2
    [ALT+R] Fred
    Mercredi 17 Septembre 2014 à 11:12
    Hé je suis pas votre seul lecteur quand même ^^

    Quand à la fiche de lecture, merci, mais 'avais déjà craqué. Maintenant, avant même la critique de mondesenchantier, je cours acheter ;-)

    Je me retrouve beaucoup dans la critique de ce jeu, que j'ai moi aussi lu presque comme un roman. Presque, parce que c'est du bien bon solide pour MJ./ A chaque page en effet, un PNJ à utiliser, en tournant les feuilles au hasard cela rapproche des personnages et donne des idées. Les illustrations sont en effet excellentes mais trop petites : comment les agrandir ? Mais c'est vraiment pour se plaindre de quelque chose.

    Pour le système, je ne suis pas assez bon pour en repérer à la ecture les failles. Quelques tests seront indispensables mais je me vois bien maitriser à ce jeu. Pas fait pour toutes les tables, j'imagine, mais j'espère en régaler mes joueurs bientôt.

    Quant à vos inspis, elles seront les bienvenues. C'est si proche de nous, les années 50, et déjà si loin. Un peu d'aide n'est jamais inutile : on prend. Et je vais essayer de donner aussi, en retour. En tous cas merci pour la citation, ça fait plaisir ;-)
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