• Souvenirs de Paris n°1

    Il ya peu, je me promenais à Paris.

    Cet article commence ainsi comme la promesse d'une affligeante tranche de mavie.com. Pourtant, comme vous vous en doutez, avec moi, les univers rôlistiques et des autres mondes en kit à monter chez soi ne sont jamais très loin.

    1ère partie : Fantaisies 1900


    En une seule journée de promenade, pourtant non programmée dans ce sens par mon petit cerveau de geek, j'ai eu le plaisir de découvrir un peu mieux, littéralement au détour de mon chemin, pourquoi j'aime tant les univers imaginaires 1900 (Maléfices, Crimes et autres by gaslight).

    Tout d'abord, le matin, nos pas nous menèrent du côté du so chic Auteuil (tu-vas-biiiien ?... air connu) où nous savions trouver quelques merveilles architecturales encore visibles mais jusqu'à quand ?, y compris au commun des mortels qui ne pourra jamais mettre les pieds dans les ruelles privatives du hameau Boileau ou de la villa Montmorency (ya kekun ki ma di ke... air connu).

    Là, le long d'une avenue un peu tristoune (en fait, la Rue La Fontaine pour ceux qui veulent y aller voir), le choc : le Castel Béranger. Construit par le célère architecte Art Nouveau Hector Guimard (celui des bouches de métro), il date des dernières années de la décennie 1890 et en cela correspond donc à ce qu'il convient d'appeler la Belle Epoque. Je savais qu'il se trouvait là, ce bel castel, mais jamais je n'avais trouvé l'occasion de pousser jusqu'à l'extrême ouest parisien pour le voir. Il s'agit là d'un véritable chef d'oeuvre de l'Art Nouveau, parfait manifeste de cette architecture organique et fantasmagorique. L'immeuble de quelques étages, tout en matériaux simples (brique essentiellement) s'orne à chaque fenêtre, balcon, angle... de formes torturées et déliées tout à la fois évoquant, selon votre humeur, de douces plantes de paradis ou les gesticulations de démons tentateurs. C'est magnifique et surtout tellement empli de fantaisie bienvenue dans nos villes toutes en cubes et grisaille préformatée.

    Quand on se contente d'observer le Castel, on se dit que cela doit être là la commande d'un riche excentrique aux idées farfelues, en rupture totale avec son temps. Mais en fait, non. Une plaque attire l'oeil : "1er prix de la plus belle façade de la ville de Paris en 1898". Un concours qui plus est organisé par le Figaro, c'est tout dire ! Je vous laisse imaginer la noble assemblée d'experts en costume sombre, barbiche et chapeau discutant des mérites respectifs des façades et s'accordant finalement sur celle, torturée, du Castel Béranger. Si on ajoute que l'immeuble est conçu pour être un HLM et que, malgré tout, son architecte choisit de s'y installer pour y vivre, je vous laisse mesurer tout ce qui sépare les années 1900 des nôtres où les mérites architecturaux de nos HLM sont, au mieux, la discrétion et la sobriété.

    Bien sûr, des contemporains n'adhérèrent pas tous à cette esthétique nouvelle. Pendant que les petits rigolos renommaient priomptement le bâtiment de Guimard le "castel dérangé", les plus graves et augustes de ces critiques invoquaient tout simplement... le Diable ! Je vous laisse lire cet extrait d'une critique de Jean Rameau :

    On l'appelle à Auteuil la Maison des Diables. Ce nom est assez justifié ! Il y a, du rez-de-chaussée à la toiture, une folle ascension de figures grimaçantes, de groupes fantastiques, où l'artiste voulut peut-être représenter des chimères, mais où le populaire voit surtout des démons, et qui font se signer à vingt pas toutes les vieilles femmes de l'arrondissement.

    Il y a des diables aux portes, des diables aux fenêtres, des diables aux soupiraux des caves, des diables aux balcons et aux vitraux, et l'on m'assure qu'à l'intérieur, les rampes d'escalier, les boutons de fourneaux, les clés des placards, tout, depuis le salon jusqu'à l'office, est de la même diablerie.

    Si Dieu ne protège plus la France, le diable du moins semble protéger Auteuil. Parisiens dormez en paix.


    Comme on le voit, on peut sans craindre de froisser la vérité historique ressortir notre boîte de Maléfices !

    Quelques heures plus tard, nous voilà passés à l'est parisien, tout près des anciens chais des entrepôts vinicoles de Bercy. La Cinémathèque, fraîchement installée dans ses nouveaux locaux, y propose une exposition sur Georges Méliès. Quand on aime la Belle Epoque, la magie et les Sélénites, difficile d'y échapper.


    Là encore, dès que l'on pénètre dans la courte (3 salles) mais foisonnante exposition, on est assailli par tout un monde de fantaisie. Fantaisie d'abord lors de l'époque où Méliès animait le théâtre Robert-Houdin à Paris : des numéros visuels comme Les phénomènes du spirtisime ou le Décapité Récalcitrant sont déjà pleins de promesses. Fantaisie toujours quand Méliès découvre les pouvoirs du cinématographe et multiplie alors les apparitions de démons, de sélénites et autres monstres des glaces. Bien sûr, tout cela a techniquement horriblement vieilli mais, au niveau de l'inspiration, il me vient comme une immense nostalgie lorsque je songe à notre triste cinéma dit d'auteur post nouvelle vague (gros soupir).

    Quand on pense aux grosses pompes à fric hollywoodiennes préformatées pour plaire au plus grand nombre (c'est-à-dire, quand on veut bien y songer, à personne) et faire vendre des jeux vidéos et des menus enfants, ils ont tout autant raté quelque chose de l'héritage de Tonton Georges. Celui-ci faisait presque tout tout seul avec des budgets faméliques et, d'ailleurs comme un symbole, l'industrie naisssante, tant en France qu'aux States, entraîna sa perte et l'obligea à finir sa vie comme simple marchand de jouets. A chialer.


    Bref, n'en jetez plus. Guimard et Méliès. Voilà précisée en simplement deux noms mon amour d'une certaine vision de la fantaisie 1900.
    « Mais... mais... quel est cet étrange pavillon ? (lecture critique du livre de base de Pavillon Noir )Souvenirs de Paris n°2 »

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